mardi 5 avril 2016

Extrait de Passage des heures de Fernando Pessoa.

Quoi qu'il en soit, il eût mieux valu ne pas naître,
Parce que, aussi intéressante qu'elle soit à tout moment,
La vie finit par faire mal, par provoquer la nausée, par déchirer, par frotter, par grincer,
Par donner envie de crier, de bondir, de rester par terre, de
sortir
De toutes les maisons et de toutes les logiques, de sauter de tous les balcons,
De redevenir sauvage pour mourir parmi les arbres et l'oubli,
Parmi les chutes et les périls et l'absence de lendemain,
Et tout cela aurait dû être quelque chose plus conforme à ce que je pense,
À ce que je pense, ou à ce que je sens — et j'ignore ce que c’est — ô vie.
Je croise les bras sur la table, je mets ma tête sur mes bras,
Et j'ai besoin de pleurer, mais je ne sais pas solliciter les larmes...
J'ai beau m'efforcer de me prendre en pitié, je ne pleure pas, Mon âme est fendue par l'index crochu qui la touche...
Que vais-je devenir ? Que vais-je devenir ?
Extrait de LE PASSAGE DES HEURES Fernando Pessoa
Ode sensationniste
Lecture postérieure aux attentats de Bruxelles de Jean Botquin

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