mercredi 4 mai 2016

La cage d'escalier

La cage d'escalier
Dans la cage d'escalier, un homme seul, ni jeune ni vieux. Il gravit les marches. À chaque étage, une fenêtre sur l'automne, le jeu coloré des pommiers, les pleurs jaunes d'un saule, les chanterelles tapies dans l'herbe. À chaque étage, la cage s'allonge vers le ciel qu'un lanterneau capte à la manière d'un oeuil de lumière. Plus l'homme monte, plus le puits se creuse dans l'ombre. Des marches, toujours des marches et des barreaux et, à chaque étage, une porte close comme une femme qui se tait. L'homme monte, la main sur la rampe. Une cage, oui, et voilà qu'un oiseau bat des ailes, volant d'étage en étage, pris d'une sorte de folie prisonnière. Il vole, butant sur les vitres d'automne. Il fuit le pas lourd de l'homme qui fait craquer les marches. Enfin, il se perche sur une des trois cariatides soutenant le plafond, tandis que s'ouvre la dernière porte devant laquelle l'homme s'est arrêté et par où apparaît une femme qui se tait. Elle ouvre la fenêtre par laquelle l'oiseau s'envole vers l'automne et le jeu coloré des pommiers. Quand la fenêtre et la porte se sont fermées, la cage d'escalier redéploie sa perspective de barreaux et de marches qui s'était arrêtée de monter. Et toutes les portes des étages se murent, à nouveau, dans le silence d'une femme qui se tait.

J.B. in "Le front Haut"

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